Dans l’univers de l’innovation et de la technologie, la compétition est souvent féroce pour parvenir en tête, mais surtout pour s’y maintenir. Ici, il ne suffit pas de partir à point, le fameux « Time to market » importe tout autant.
Don Dodge à très bien décrit ce phénomène dans un billet intitulé First Mover vs Fast Follower, avec les grandes batailles de l’informatique récente : tableurs, navigateurs, moteur de recherche, réseaux sociaux, etc. Ma préférée étant celle des terminaux mobiles, où Apple fait le premier mouvement avec le Newton, se fait doubler ensuite par Palm qui se fait ensuite doublé par BlackBerry, et finalement c’est à nouveau Apple qui reprend la tête avec l’iPhone. Univers impitoyable ! 🙂
Les First Movers du jeu en ligne grand public
Cela paraît simple vu de l’extérieur, mais quand on est à l’intérieur de la course, se positionner est très difficile.
Avec Owlient, nous nous sommes lancés en 2005 avec le jeu web Equideow.com. À cette époque, nous étions peu nombreux sur ce marché du jeu Web communautaire/social grand public (mettons tout dans le même panier pour cette fois !), on peut dire que nous faisions partis des First Movers1.
Ce qui a mon sens est symptomatique d’une position de First Mover est l’absence de repère et la difficulté à se positionner. Un exemple illustre bien cela. Quand en 2005/2006 nous expliquions notre activité avec Equideow, la première réaction ressemblait à : « Ah c’est comme World of Warcraft ou Second Life ? ».
Évidemment Equideow est à des années lumières de ces produits, c’est dire le travail d’éducation que nous avions à faire. Une fois expliqué, au dela du produit, c’est le business modèle « free-to-play » et de vente de bien virtuel qui impressionnait par son originalité et son efficacité. Le plus terrible, c’est que le temps passé à expliquer l’activité, c’est autant d’énergie qui n’est pas employée à exécuter le business.
Et le Fast Follower apparait et rafle la mise !
Quelques années plus tard, je me souviens m’être rendu à la conférence LeWeb en décembre 2009. Alors que je présentais Owlient et Equideow à quelqu’un, je n’ai pas eu besoin d’expliquer que nous étions différent de WoW ou de détailler notre modèle économique. Sa réaction fut imparable : « Ah, vous faites la même chose que Zynga ». Bien que n’ayant pas d’illusion sur notre place dans le marché à ce moment là, c’est le genre de réaction qui siffle la fin de la récré. Zynga est un cas typique de Fast Follower : arrivé après tout le monde, mais qui avec une exécution implacable a laissé tout le monde sur place.
Là où nous étions de nombreux petits acteurs a avoir compris le potentiel du jeu en ligne pour le grand public et la pertinence du modèle free-to-play, sans pour autant parvenir à « scaler » très loin, l’innovation que représente la plate-forme Facebook et le social graphe a permis a un acteur de rafler la mise et mettre au grand jour le vrai potentiel du marché. Paradoxalement, qu’un Fast Follower accroisse significativement le marché favorise la prospérité des plus petits qui peuvent continuer à croître en même temps que le marché.
Et ce petit jeu peut durer longtemps comme l’exemple dans les terminaux mobiles le montre. Rien n’est figé, l’innovation restant le meilleur moyen de reprendre le dessus, un changement de paradigme étant si vite arrivé dans l’univers technologique 😉
- hors Asie du moins, et bien sûr tout est relatif. Dans le cas d’Equideow par exemple, nous n’étions pas les premiers à s’adresser à une cible grand public et plutôt féminine, d’autre l’avait fait avant nous sur des modèles économique/produit différents. Mais au final, l’histoire retiendra que c’est Zynga qui a révélé ce marché !
Jonathan
Même si Zynga a repris des éléments importants de l’industrie free to play, je considère la boîte plutôt comme un first mover qu’un fast follower car, comme tu le dis, ils sont les premiers à avoir fait des jeux spécialement pour facebook (qui sont quand même bien différents des autres). Et la preuve c’est que beaucoup d’éditeurs (followers) qui ont voulu faire pareil depuis se sont cassés les dents.
Olivier
En fait, je les considère follower plus dans une optique de cible que de produit. Quand Zynga a émergé la presse a trouvé étonnant que leur cible soit aussi grand public et surtout aussi féminine. Mais pourtant ils n’étaient pas les premiers à défricher le terrain sur cette cible. En cela ce sont des fast-followers : pas les premiers arrivés, mais ils ont plus rapidement capté la plus grosse part du gâteau.
Jérémy
Zynga n’a pas été le premier a se lancer sur Facebook, d’autres y étaient avant. Cependant il a été celui qui l’a fait dans un fracas assourdissant en usant et abusant de la viralité que propose cette plateforme. Zynga n’innove pas et son PDG l’avait clairement dit, il n’a rien d’un first mover je pense. Il ne fait que copier les autres en profitant de son poids et en augmentant de manière démesurée la communication de ce dernier pour écraser le jeu originel. C’est donc un gros fast-follower. Si un jeu fonctionne, il le copie de manière extrêmement rapide et en tire la gloire au point que certains joueurs pensent que le jeu de Zynga est l’original et l’autre la copie.