Mon précédent article sur la pérennité d’une startup a pu être mal interprété en ce qui concerne l’intérêt d’une levée de fonds auprès de capitaux risqueurs, les fameux VCs. C’est une question qu’on s’est souvent posée avec mon associé Vincent, et qu’on me pose régulièrement : si c’était à refaire, lèverions-nous des fonds pour Owlient ?
Dans le contexte de l’époque, la question ne s’est pas vraiment posée. Bien qu’Equideow était déjà très rentable et nous permettait d’autofinancer de nouveaux leviers à exploiter, nous avions encore plus d’ambition, notamment développer 4 nouveaux jeux par an, et bien sûr aller vite à l’international (en pratique, on a réussi que la seconde partie). Pas un instant la question ne s’est posée de faire autrement que de lever des fonds, vu les objectifs en face.
Cet instant est cependant arrivé plus vite que je ne le pensais, puisque le lendemain du closing mon associé m’expliquait avoir signé seulement car j’avais beaucoup bossé dessus, et qu’il ne voulait pas tout gâcher. Ça vous met la pression pour la suite, pas question de se planter. J’ai passé 3 ans à lui répéter de ne pas s’inquiéter, que tout irait bien 😉
La réalité c’est que nous avions besoin de cet argent, non seulement pour financer les nouveaux projets et l’internationalisation, mais surtout pour travailler sereinement à l’abri des problèmes de trésorerie. Avec nos compétences d’aujourd’hui, nous serions capables de refaire la même chose sans lever des fonds, en se concentrant sur Equideow uniquement. Mais voilà, il y a 5 ans, nous enchaînions beaucoup d’erreurs de management et de gestion de projet à vouloir croître trop vite et gérer trop de projets en parallèle. Le genre d’erreur qui fait fondre la trésorerie vite, très vite. D’une certaine manière, on s’est payé un MBA intensif en conditions réelles !
Ce fut une expérience d’autant plus positive que dans les moments difficiles, nos investisseurs nous ont toujours supporté. Je me souviens ainsi de l’unique fois où Vincent et moi avons escaladé un problème qui nous divisait et prenait trop d’ampleur. La réaction de notre investisseur fut je pense exemplaire : peu importe notre décision, il nous soutiendrait tant que nous étions d’accord tous les deux. Reponse qui peut paraitre inutile, mais d’une grande sagesse et qui nous a permis de prendre du recul et vite se mettre d’accord. Bon nombre d’investisseurs aurait facilement pris parti, au risque que l’un des fondateurs quitte, mettant en péril la société.
Au final, nous n’avons consommé que la moitié des 3M? levés. Aurions-nous du lever moins ? Non, car on est aurait pu être plus long à réagir et retrouver notre profitabilité. Et definitivement non car personne n’est dupe, la valorisation aurait été ajustée pour que l’investisseur ait le même pourcentage.
Tout cela reste donc pour moi une expérience largement positive, et à moins de réécrire l’histoire, ce serait à refaire. 3 ans après cette levée, l’investisseur à fait un bon multiple, nous nous sommes constitués un patrimoine et Ubisoft à acquis une bonne équipe pour son développement dans le online.
Maintenant, si j’étais amené à créer une nouvelle entreprise, il est clair que je pousserai l’autofinancement le plus loin possible en evitant l’éparpillement des projets et en faisant preuve de toute la rigueur acquise avec l’expérience Owlient. C’est l’avantage d’un serial entrepreneur j’imagine, je n’ai plus 21 ans et je sais ce que le mot « exécuter et délivrer » veut dire 😉
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