Si il y a bien un sujet qui semble provoquer des désaccords profonds entre fondateurs et investisseurs, c’est celui du « cash-out ».
Il peut s’agir pour les fondateurs, lors d’une levée de fonds, de céder une partie de leurs titres aux nouveaux investisseurs. Ou bien de verser des dividendes conséquentes lorsque la société devient profitable.
Le désaccord apparait donc quand les fondateurs, souvent partis de rien, commencent à vouloir matérialiser leur patrimoine. D’où vient la crispation ?
Pour le fondateur, qui a pris des risques et a le sentiment d’avoir tout donné, il y a la volonté naturelle d’assurer ses arrières et mettre à l’abri ses proches. Cumuler les risques professionnellement et personnellement peut devenir pesant à la longue.
Pour les investisseurs, qui cherchent la meilleure sortie à la plus forte valorisation, il y a la volonté d’avoir des fondateurs concentrés sur le business, qui « ont faim » et n’ont pas d’autres choix que de réussir.
Un fondateur qui commence à penser patrimoine personnel au point de se désengager en partie de sa société présente le risque de lever le pied, de commencer à « profiter de la vie » avec son argent. Le risque est réel. C’est d’autant plus gênant pour l’investisseur qu’un cash-out quelqu’il soit (cession de titres au lieu d’émission de nouveaux, dividendes) signifie moins de ressources pour le développement de l’entreprise.
Pour autant, de ce que j’ai pu vivre moi-même ou entendre, je trouve la position des investisseurs souvent exagérée lorsqu’ils refusent net tout cash-out. Je comprends leur position, mais elle a deux sérieux travers à mon sens.
On peut arriver à des situations absurdes où le fondateur a des complications financières à titre personnel, et perd du temps et de l’énergie pour des sommes ridicules eut égard à la valorisation de sa société. Tout le monde a intérêt que le fondateur arrive au boulot l’esprit libre de toute contrainte personnelle, et se concentre sur le business.
L’autre travers de fondateurs qui n’ont jamais fait de cash-out, c’est la tentation extrême de tout vendre dès que l’opportunité se présente. À vouloir des fondateurs qui « ont faim », les investisseurs prennent le risque de ne pas voir la participation valorisée au maximum de son potentiel…
Où est le juste milieu ? En réfléchissant au sujet, une idée est d’autoriser un cash-out permettant au fondateur d’être propriétaire de son appartement ou de sa maison, lorsque la société est devenue profitable, avec un volume d’activité qui atteint plusieurs millions d’euros et qu’un nouveau financement se prépare.
C’est un marqueur comme un autre, mais il a l’avantage d’apporter au fondateur de la sérénité et un peu d’aisance financière, n’ayant plus de loyers ou emprunt à payer. Pour l’investisseur, cela reste une somme raisonnable par rapport à la valorisation d’une société de ce type (si le fondateur est raisonnable sur son domicile bien sûr !).
Une chose est sûr, il est important de pouvoir avoir une discussion apaisée sur la question globale de la rémunération des fondateurs, dans l’intérêt de tous : que les fondateurs soient dans les meilleures conditions pour aller le plus loin possible. Pour certains, cela signifie être rassuré sur ses finances personnelles pour tout donner sur la société.
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