On a coutûme de dire que sur le web, on est qu’à un clic de n’importe quel autre site. Que l’immensité du contenu du Web nous est facilement accessible. Que si la barrière linguistique subsiste tout de même, la barrière géographique est, elle, tombée.

C’est cette notion géographique qui m’intéresse. Je lisais cet il y peu un commentaire au bas d’un article, faisant état de diverses réflexions touchant au marketing notamment. Ce commentaire était bien écrit et pertinent, vraisemblablement dans l’idée d’amener le lecteur vers le blog de l’auteur, probablement un consultant. Je me souviens à cet instant précis m’être demandé, au fond, pourquoi je cliquerai et éventuellement plus tard suivrai ce blog. J’imaginais déjà le blog avec un beau design, un contenu pertinent. Et pourtant, bien qu’à un clic, je trouvais ce site étrangement loin.

Revenons à cette barrière géographique, avec un exemple plus simple. Il y a plus de 30 000 boulangeries en France. Et pourtant, barrière géographiques oblige, lorsque je veux acheter mon pain, je n’en fréquente que 2 ou 3, les plus proches de chez moi. C’est un commerce local. Imaginons maintenant une boulangerie virtuelle (le rêve pour les croissants le matin !). Me voilà avec 30 000 boulangeries à disposition, comment vais-je faire mon choix ?

C’est un peu la réflexion que je me faisais tout à l’heure. Il y a tant de blog sur le marketing, pourquoi donnerai-je mon attention à celui-là ? Mon sentiment sur l’instant était que si ce site me semblant loin, c’est que quelque part il n’émanait pas d’une communauté d’intérêt à laquelle je fais implicitement partie.

Recrée-t-on inconsciemment un environnement local ?

Depuis que j’ai découvert le cyber-espace, j’ai « appartenu » à diverses communautés. Je me souviens avoir longuement été dans la communauté PHP. Puis, sans m’en rendre compte, j’ai dérivé vers la communauté naissante autour du respect des standards. Par dériver, j’entends que mon attention était alors plus portée vers cet écosystème de blogs, de forums, d’acteurs, etc. Puis, plus indirectement, j’ai dérivé vers la communauté autour du monde de l’innovation et des start-up. Aujourd’hui, les deux premières communautés me semblent loins aussi, bien que leurs écosystèmes soient eux aussi à un clic seulement.

Au fond, si je n’ai pas visité le blog en question, c’est, je pense, parcequ’il m’a paru étranger à ma communauté d’intérêt actuelle autour de l’innovation et des start-up. Non pas que le marketing ne soit pas un thème abordé dans cette communauté, loin de là. Mais je pense que j’y aurai prêté plus d’attention si je l’avais découvert par le biais par exemple d’un blog de cette communauté, et non pas d’un site généraliste comme c’était le cas là.

Cette réflexion peut sembler basique (tout ça pour un clic), pourtant elle amène je trouve un certain nombre de questions que je trouve intéressantes :

  • en adhérant implicitement (par l’attention qu’on y consacre) à des communautés d’intérêt, ne recrée-t-on pas sans s’en rendre compte un environnement que l’on peut qualifier de local au sens géographique du terme ?
  • ne se laisse-t-on pas finalement influencer par cet écosystème local auquel on s’identifie, s’imposant en quelque sorte une frontière qu’on ne songe pas à franchir car loin du coeur de sa communauté d’intérêt ?
  • si la communauté a une réelle influence sur nos explorations dans le cyber-espace, quelle incidence pour celui qui cherche justement à capter l’attention ?

Ce qui me fascine dans le virtuel, c’est cette contradiction entre la volonté (par l’effort technologique) de lever les contraintes du monde réelle et, dans le même temps, cette tendance naturelle à en recréer artificiellement (peut-être est-ce rassurant ?). Cette réflexion est un exemple de contrainte artificielle : il y a t-il des espaces locaux dans le cyber-espace ?