Il y a deux semaines, j’ai fait deux achats assez contradictoires : d’un côté j’ai remplacé mon PC qui commençait à dater, et de l’autre j’ai craqué pour un iPad. Après deux semaines d’utilisation, un premier bilan s’impose :

  1. je ne regrette pas l’achat de mon PC. Je m’éclate comme un petit fou sur F1 2010, je m’extasie devant les graphismes d’Assassins Creed 2, le traitement photo avec Lightroom ne rame plus, et cerise sur le gateau, Windows semble se bonifier avec l’age.
  2. en dehors des jeux, de la photo et de la programmation, je fais tout sur l’iPad, tranquillement dans mon canapé. Je n’allume plus mon PC que quand j’en ai vraiment besoin (jeux, photos, code), ce qui ne représente qu’un tiers de mon usage informatique environ. Chose impensable, il m’est arrivé un jour où je suis resté chez moi de ne pas allumer mon PC !

J’avoue que j’étais sceptique sur l’iPad, mais il n’a fallu que quelques jours pour me rendre compte que cela répondait presque parfaitement à mes besoins. Aucun doute, il y a un vrai marché pour ces tablettes tactiles, les chiffres de ventes d’Apple ne m’étonne plus maintenant !

Web versus Applications natives : exemple des lecteurs RSS

En revanche, ce qui m’intrigue plus dans l’iPad sont les applications qui sont développés pour ce support. Prenons l’exemple des lecteurs RSS. Cela fait plusieurs années que j’utilise Netvibes et j’en suis pleinement satisfait, l’interface est autrement plus compréhensible que celle de Google Reader.


La moitié de la surface n’est pas utilisée sur Netvibes iPad…

Une fois sur l’iPad, mon premier réflexe est donc de chercher Netvibes dans l’Appstore. Peine perdue, Netvibes a opté pour une version Web optimisée pour l’iPad plutôt qu’une application. Même si j’apprécie l’effort de Netvibes pour ce support, je dois dire que je suis pas du tout emballé par l’ergonomie tout en menu et sous-menu, n’exploitant pas du tout la surface de l’iPad.

Qu’à cela ne tienne, je me renseigne sur les bons lecteurs RSS sur iPad. Je commence par Reeder. L’interface est sobre, pas super excitante, mais très fonctionnelle, et répond bien à mon besoin pour suivre les fils où je veux être sûr de ne rien rater.


Pulse News

Puis vient Pulse. Première application qui m’a bluffé sur l’iPad. Le principe est simple : à chaque ligne un fil RSS, et vous faites défilez horizontalement pour les éléments du fil. C’est très graphique, permet de repérer rapidement ce qui nous intéresse. C’est bien adapté pour les fils où je ne souhaite pas forcément tout suivre, mais juste regarder de temps à autres.


Flipboard.

Enfin, je découvre Flipboard. Encore une façon radicalement différente de consommer l’information. Tout simplement, vos fils RSS, ainsi que vos comptes Twitter ou Facebook, sont agrégés sous la forme d’un magazine, qu’on consulte en tournant les pages. La lecture est vraiment agréable et bien pensée. Impressionnant.

Web versus Applications natives : le dilemme pour les éditeurs

Est-ce parce que Netvibes a fait le choix de techno Web que leur application iPad est moins pertinente ? Est-ce que seule une application native peut vraiment satisfaire les exigences des utilisateurs ? Je n’ai pas encore rencontré d’application Web avec une interface pour iPad vraiment bluffante. Quelque chose me dit qu’il s’agit plutôt d’un choix des éditeurs de rationaliser les développements, et de temps accordé à l’étude et l’optimisation de chaque support.

Car au delà du fait que j’apprécie l’iPad en tant qu’utilisateur, du point de vue professionel, j’ai l’impression qu’on assiste à une régression. Autant le Web a permis lors de la dernière décennie de s’affranchir des contraintes de systèmes d’exploitation (ce qu’avait tenté Sun avec Java lors de la décennie d’avant), autant l’apparition de ces différents OS mobile (iOS d’Apple, Androïd de Google, etc.) nous fait faire le chemin inverse, avec la potentielle nécessité pour les éditeurs de services Web de développer des applications spécifiques pour chaque OS.

Seules les technos Web permettraient de poursuivre la logique « une application pour plusieurs plate-formes »

Certes, deux ou trois OS mobiles pour tout le marché, c’est un progrès énorme pour le monde du mobile, comparé à la situation d’il y a 5 ans qui induisait des coûts de tests importants pour les développeurs mobiles. Mais pour les éditeurs Web, alors qu’on pensait voir le bout du tunnel avec les incompatibilités majeures entre navigateurs, voilà que du fait de la démocratisation du Web mobile, on se retrouve à nouveau avec plusieurs supports différents à gérer !

Il faut bien comprendre que malgré les attentes et exigences des utilisateurs, peu d’éditeurs ont les moyens de supporter la maintenance d’une même application avec plusieurs versions dédiés à chaque support (Web, iPhone, Androïd, iPad, etc.). Ce qui laisse entrevoir plusieurs hypothèses à l’avenir :

Le 100% multi-plateforme

L’usage des services en ligne continue dans la même direction, avec un niveau d’exigence des utilisateurs toujours plus élevé. Les éditeurs n’ont pas le choix que de supporter plusieurs versions de leur application, dédiées à chaque support. La barrière à l’entrée des services Web augmente drastiquement, ce qui réduit de facto l’innovation.

La spécialisation des éditeurs par plate-forme

Les éditeurs se spécialisent sur l’un ou l’autre des supports. On se retrouve au temps où des applications ne sont disponibles que sur certains systèmes. La plateforme la plus ouverte à l’innovation attirera les meilleurs développeurs. A ce petit jeu, aucun doute que le Web l’emporte sur le long terme (déjà 20 ans de track record en matière d’innovation, quelle plateforme peut en dire autant ?)

Une plate-forme prend le pas sur les autres

L’un des supports l’emporte sur les autres, par son adoption massive. Mais contrairement à Wired, je ne crois pas à la mort du Web, toujours pour les raisons de structure intrinsèque favorisant l’innovation mieux que n’importe quelle autre plateforme. Par contre, probablement un OS mobile prendra le pas sur les autre, ou bien les technos Web s’imposeront sur les supports mobiles.


Ces évolutions du marché et de l’industrie se retrouve dans l’actualité avec le débat autour de la fameuse application iPad de Facebook. En tant qu’utilisateur d’iPad et de Facebook, je ne comprends vraiment pas que Facebook puisse ignorer ce support, c’est un vrai manque. En tant que professionnel, je doute qu’il s’agisse d’une question de moyen pour Facebook. Aussi, j’apprécie quand Mark Zuckerberg indique que l’iPad est un ordinateur parmi d’autres, sous entendant qu’il peut accéder à la version Web, et que Facebook n’a jamais développé d’application desktop spécifique ! C’est provocateur, mais cela a le mérite de lancer le débat au sein de l’industrie du Web.