Avec l’introduction en bourse de Facebook, on va assister à un phénomène désormais récurrent désormais dans la Silicon Valley : le fondateur va certes s’enrichir, mais aussi les centaines d’employés Facebook (si ce n’est le millier) qui vont devenir millionnaires ! C’est ce genre de méga-sortie, connues dans la dernière décennie avec Paypal et Google par exemple, qui alimente l’écosystème de la Silicon Valley et permet de financer la prochaine génération d’entrepreneur.
En France, on évoque souvent de nombreuses solutions pour améliorer l’écosystème entrepreneurial, mais on oublie facilement qu’on lutte contre un facteur imperturbable : le temps. Il a fallu plusieurs décennies à la Silicon Valley pour en arriver là, il faudra aussi plusieurs générations d’entrepreneurs en France pour parvenir au même niveau.
Les choses bougent bien sûr. Le phénomène marquant en France depuis quelques années, c’est l’apparition des fonds d’entrepreneur, comme Jaïna (Marc Simoncini de Meetic et iFrance), ISAI (Kosciuzo-Morizet de PriceMinister) et Kima Ventures de Xavier Niel (Iliad/Free). Si on peut se réjouir de cette évolution de l’écosystème, il faut être réaliste : c’est le fait de quelques fondateurs à grand succès. A-t-on vu beaucoup de salariés bénéficiaires de stock options (BSPCE en France) investir en tant que professionnel en France ? Pas à ma connaissance1, et ce n’est pas étonnant.
Le calcul est simple. Prenons comme hypothèse de base qu’un heureux titulaire de stock options voudra au moins garder après la sortie 1M€ pour son patrimoine (c’est vite arrivé avec la résidence principal, surtout sur Paris). Quand bien même il serait prêt à investir 50% de son patrimoine dans des start-ups, ce qui est déjà très élevé2, il lui faudrait avoir perçu 2M€ net d’impôt, soit au moins 3M€ brut pour faire simple.
À supposer que la société ait distribué 10% de son capital à environ 20 salariés, cela suppose une sortie à 600M€. On peut tourner les paramètres dans tous les sens, il faut des sorties à environ 500M€ et plus pour créer non pas un super business angel, mais plusieurs dizaines d’un seul coup, et accélérer ainsi la croissance de tout l’écosystème. Sommes nous capable de créer ce genre de méga-sorties en France et en Europe ? Oui, mais pas tant que ça au final.
Bien sûr il y a de nombreux autres business angel qui ont construit leur patrimoine d’autre manière. Mais les méga-sorties sont le seul moyen3 de faire croître significativement et rapidement le nombre de business angel, qui plus est qualifiés car ayant vécu une expérience de start-up de l’intérieur. C’est à cette condition qu’on aura la prochaine grosse évolution de l’écosystème entrepreneurial, mais il faut être patient !
- Je ne demande qu’à être contredit !
- Quoi qu’il arrive, pour faire cela professionnellement il faut un minimum d’effet statistique, soit une dizaine d’investissement, et avoir au moins 100k€ par ligne d’investissement, soit 1M€ au moins. Cela n’empêche pas avec moins de faire quelques investissements bien sûr, mais ce n’est pas la même logique.
- Un autre frein supplémentaire est le mécanisme de stock-option en lui-même, encore incompris par beaucoup de salariés. Là aussi il faudra du temps. Encore que la pénurie de profil d’ingénieur va accélérer cette pratique, et ce dès l’embauche.
J. Tessier
Olivier,
Je suis 100% d’accord avec toi qu’il faut du temps mais qu’on part avec 2 handicapes supplémentaires :
– La fiscalité : elle est plus lourde en France, il y a donc moins d’argent à investir.
– Le language : pour réussir à faire des grosses valo, il faut aller à l’international ce qui nécessite plus de temps et d’investissement. Alors que les américains ont déjà leur 1er marché qui est ENORME.
Pour améliorer les choses il faudrait au niveau politique (selon moi) :
– Réduire l’IS pour les entreprises qui exportent !
– Créer un crédit d’impôt (IR et ISF) de 100% de l’investissement dans une nouvelle société. (Sans minimums)
– Favoriser encore plus les échanges d’étudiants internationaux
– Réduire l’impôt sur le revenu et augmenter les impôts sur les revenus du capital. (Incite à la plus-value et réduit la rente)
Matthieu Bonne
Il est aussi possible de créer une structure hybride, avec des associés qui gagnent des parts de capital à mesure qu’ils apportent du travail à la société, et des salariés "traditionnels". C’est le pari que nous avons fait à DreamCave, et notre Comité de Développement compte 20 membres (développeurs, rédacteurs, traducteurs, game designers, musiciens…). 20% du capital de notre start-up leur est réservé.
Si le succès est au rendez-vous, d’ici quelques années, leurs parts auront plus de valeur que s’ils avaient été salariés. 🙂