On m’a interrogé à deux reprises récemment sur l’utilité ou pas de passer par un leveur quand on cherche à lever des fonds pour une start-up. A partir d’un certain montant levé (je dirai environ 1M€ mais ça se discute), je pense que c’est indispensable, pour 3 raisons principales.

Obtenir les bons contacts

Ce que mettent en avant les leveurs de fonds c’est en premier lieu leur carnet d’adresse auprès des investisseurs. Quand nous avons levé 3M€ en 2008 pour Owlient, nous ne connaissions aucun investisseur, donc c’était indispensable.

Quand on a déjà une première expérience ou qu’on a gagné en visibilité via un accélérateur ou un concours de start-up, on peut être tenté de penser qu’on a déjà les bons contacts. Je pense que c’est un mauvais raisonnement. D’une parce qu’on a jamais un réseau exhaustif, et deux car on a mieux à faire à se concentrer sur sa start-up qu’à entretenir un réseau d’investisseurs en perdant du temps dans les cocktails.

Structurer le processus

Il faut imaginer le processus de levée de fonds comme un entonnoir avec au début beaucoup de contacts, puis plusieurs rendez-vous, quelques seconds, éventuellement une ou deux lettre d’intentions, et au final si tout va bien, un investissement réalisé.

La valeur ajoutée du leveur, c’est de s’assurer que tous les investisseurs prospects avancent au même rythme dans ce processus, en suivant les mêmes étapes pour ne rien oublier dans l’information qu’on délivre. C’est indispensable pour éviter des situations compliquées qui peuvent à minima faire perdre du temps, au pire nuire à l’image de la société et réduire ses chances de réussite pour lever des fonds.

Préserver une bonne relation future

C’est moins souvent évoqué, et pourtant c’est le plus important à mes yeux. Un intermédiaire, ça sert… d’intermédiaire ! Autrement dit, il faut l’utiliser au maximum pour ce qu’il est : un conciliateur. Quand on lève des fonds, on doit négocier avec des personnes avec qui on sera associé pendant plusieurs années par la suite. Les négociations pouvant être tendues, c’est important de ne pas détériorer la relation fondateurs-investisseurs au point que cela puisse laisser des traces dans le futur.

Un intermédiaire ça sert donc à ça : c’est lui qui prend les coups, c’est lui qui fait passer les mauvaises nouvelles ou qui négocie jusqu’au bout comme un marchand de tapis. Le fondateur préserve ainsi son image et une bonne relation future avec l’investisseur.

Le plus important c’est de lever !

Alors bien sûr, tout cela a un coût, et je suis le premier à avoir mal au coeur quand il faut payer l’intermédiaire. A ce titre, il faut tout de même ne pas accepter n’importe quoi (fixe et success fees en % du montant levée oui, pourcentage du capital non, c’est exagéré à mon sens).

Il faut cela dit garder en tête le vrai enjeu : une levée de fond est un processus incertain. Il n’y a pas d’économie réalisée à le faire seul si au final la levée n’aboutit pas. C’est là le principal intérêt d’un bon leveur : c’est une plus grande garantie que cela aboutisse.

D’ailleurs un bon leveur ne prendra pas votre dossier si il pense pas que cela puisse aboutir, vu qu’il met en jeu ses success fees. Cela peut donc être un bon test d’aller en voir un, et avoir son avis sur votre dossier.

Enfin, gardez en tête que quoi qu’il arrive, ce sera à vous de convaincre du projet et de la vision de la société, ça aucun intermédiaire ne le fera pour vous, ou tout du moins aucun ne le fera mieux que vous. Un leveur ne vous épargnera donc pas du temps à bien rédiger le dossier, la présentation et les rendez-vous pour convaincre.

A noter : je n’ai aucun intérêt chez les leveurs de fonds, et le raisonnement est le même dans le cadre d’une cession, l’aide d’une banque d’affaire me semble indispensable.